19 février 2020
Photo: archive personnel

L’avocat Cristiano Zanin, responsable de la défense de Lula, a été reçu samedi 15 février par l’ancien juge de la Cour suprême italienne Gherardo Colombo, l’un des procureurs responsables de l’opération Mani Pulite (Mains Propres), qui a enquêté sur des cas de corruption dans ce pays européen au cours des années 90.

La réunion, qui a duré environ 2 heures, s’est tenue de manière informelle à Milan. Ils ont notamment évoqué le «Lava Jato», les excès commis par l’ancien juge Sergio Moro, aujourd’hui ministre de la Justice, et l’arrestation de Lula en 2018. Zanin en a profité pour remettre à l’ancien procureur un exemplaire du livre «Introduction au lawfare», qu’il a écrit avec l’avocat Valeska Teixeira, le juriste Rafael Valim.

“Je comprends qu’il est impossible de comparer “Mani Pulite » (Mains Propres) et”Lava Jato » (Lavage Express), surtout après cette conversation”, a déclaré Zanin à ConJur. L’avocat a également déclaré que Colombo semblait choqué d’apprendre que Moro avait autorisé l’écoute durant 23 jours du poste principal du bureau de Zanin. L’information a été obtenue en exclusivité par ConJur en mars 2016.

«L’opération anti-corruption qui a eu lieu en Italie peut être critiquée à certains égards, en particulier pour avoir exposé les accusés à la presse afin qu’ils arrivent amoindris au procès. Mais le «Lava Jato» est allé beaucoup plus loin: il a fait appel à des avocats; le juge principal a coordonné les poursuites en coulisse et comploté contre le principal accusé et sa défense; il a été alimenté par une coopération informelle et illégale avec les procureurs des États-Unis; et c’était un instrument de lawfare, c’est-à-dire d’utilisation stratégique du Droit dans le but de délégitimer, nuire ou anéantir un ennemi », dit-il.

Toujours selon lui, «Lava Jato» a utilisé précisément les caractéristiques les plus discutables de l’opération italienne, «en particulier, l’utilisation des médias pour affaiblir l’accusé et la défense».

«Dans « Manu Pulite », ils ont prouvé la culpabilité du principal accusé, Bettino Craxi. À «Lava Jato», ils ont inventé un complot pour imposer une culpabilité artificielle au principal accusé, l’ancien président Lula, et ont cherché à mettre cette version sur pied avec des allégations mensongères qui ont procuré des avantages substantiels à ceux qui ont effectivement pratiqué des actes illicites.»

Luigi Ferrajoli
La veille, Zanin et Lula avaient été reçus à Rome par le juriste Luigi Ferrajoli, l’un des plus importants théoriciens italien du rôle de garant de la juridiction ancrée dans les principes de la Constitution, ainsi qu’un ardent critique de «Lava Jato» et de Moro.

Dans une lettre publiée dans ConJur en 2018, Ferrajoli a exprimé ses préoccupations concernant «le singulier aspect inquisitoire du processus pénal brésilien» et la confusion «entre le rôle de jugement et le rôle d’instruction».

“L’impression que ce processus [contre Lula] suscite dans un large secteur de la culture juridique démocratique italienne, est celle d’une absence impressionnante d’impartialité de la part des juges et procureurs qui l’ont promu”, avait-il déclaré à l’époque.

ConJur |Traduit par Francis Gast.